Je n’étais à Gold Coast que depuis quelques semaines. Une ville qui n’avait vraiment rien à voir avec mon Wilmington natal. GC à beau être agréable, ce n’est pas toujours simple de s’adapter à un nouveau mode de vie. Surtout que je me retrouve seule, sans mes proches. Malgré tout, je ne regrette pas mon choix. Avais-je vraiment le choix ? La vie à Wilmington m’était devenue insupportable et il fallait que je m’en éloigne. Je dois dire que pour mettre éloignée, je me suis vraiment beaucoup éloignée. L’Australie et la caroline du sud des États-Unis, ce n’est pas du tout la porte à côté. Je ne connais pas encore grand monde ici. Il faut dire qu’en arrivant, j’avais d’autres priorités que de sortir et d’aller rencontrer des gens, même si mon départ était bien préparé. Je ne suis pas partie sur un coup de tête. Ce départ et le fruit de longues réflexions. Je vis dans mon petit appartement dans le centre de la ville. Vivre seule, ça aussi c’est une première. A Wilmington, je partageai un appartement avec Charlee et Logan, ma sœur et mon frère. C’est très étrange désormais de rentrer le soir et de n’avoir personne, d’être seule pour le déjeuner ou le dîner. Charlee et Logan me manquent énormément. Nous avons toujours été collés ensemble, alors c’est aussi nouveau pour moi de me trouver aussi loin d’eux.

Arrivée devant le Hard Rock café, je sortais de toutes mes réflexions. Ce boulot de serveuse était la première chose que j’avais trouvée, alors j’avais pris. Je n’allais pas faire la difficile dans un monde ou trouver du travail est si compliqué. C’était déjà bien d’avoir un emploi pour garder un toit sur ma tête et de la nourriture dans mon assiette. Je saluais mes collègues et passait derrière pour déposer mes affaires dans les vestiaires du personnel. Je me changeais pour enfiler le t-shirt du hard rock café au lieu de mon débardeur blanc. Je portais une jupe noire, des ballerines et mes cheveux étaient relevés en queue de cheval. Enfin prête pour prendre mon service, je rejoignais la salle principale. J’attrapais calepin et stylo pour aller prendre mes premières commandes de la journée. Lors que j’étais gamine, jamais je ne me serai imaginé serveuse. Je rêvais de devenir chanteuse, comme beaucoup de petites filles. Seulement, la musique est restée pour moi une vraie passion. Je ne peux pas vivre sans. J’arrivais devant une table où était assis un homme seul. Un chien était allongé à ses pieds et l’ordinateur sur la table m’indiquait qu’il était sûrement un plein travail. Beaucoup de travailleurs venaient manger ici le midi, car la restauration est rapide. Le soir, c’est une toute autre ambiance. De nombreux concerts sont organisés au Hard Rock Café. J’adressais un grand sourire à mon client et notais sa commande. Il commandait même pour son chien. C’était bien la première fois qu’un client commandait pour son chien depuis que j’étais là – « Oui, c’est noté pour vous et aussi pour lui. Je vous apporte ça. » - Dis-je d’une voix douce avant de laisser mon client pour aller transmettre la commande en cuisine. Je rapportais immédiatement la gamelle d’eau pour le chien. Seulement, arrivée devant la table, ma maladresse me jouait un tour. Oui, je suis parfois une vraie miss catastrophe ! Je sentis qu’on me bouscula légèrement et cela suffit à me faire vaciller sur mes pieds. Résultat, la gamelle que je tenais encore dans les mains se retrouva renversée. La moitié de l’eau était désormais parterre et la gamelle presque vide dans mes mains. Bravo, Lenny ! Merde pensais-je ! – « Je suis désolée. Je vais nettoyer ça et en rapporter une autre. » - Dis-je à l’adresse de l’homme, vraiment honteuse d’être aussi maladroite. Pour qui est-ce que j’allais passer encore ?

L’homme explosa de rire suite à ma maladresse. Bien évidemment, comment ne pas en rire ? Mes joues se mirent légèrement à rosir, gênée. Je passais pour une gourde et le rire de mon client me mettait mal à l’aise. D’autant plus que je venais de me payer la honte devant lui, qui je dois le dire, est plutôt bel homme. Bref. Je crois que j’aurais aimé me transformer en petite souris pour fuir et aller me cacher. Mes lèvres dessinait un demi sourire, essayant de cacher mon malaise tandis-ce que l’homme me présentait ses excuses – « Ce… ce n’est rien. Je vais bien. J’espère que je ne vous ai pas projeté d’eau. Encore désolée. » - Le chien s’était mit à boire l’eau parterre. L’animal n’en avait vraiment rien à faire de cet incident et cela n’allait pas l’empêcher de s’abreuver. Son maître se leva, voulant apparemment m’apporter son aide. Malgré le fait qu’il ait rit au début, il se montrait beaucoup plus sympathique que la majorité des gens. En général, si vous vous montrez maladroite devant un client, il va tout de suite se mettre à râler et vous traiter d’incompétent. Heureusement que je ne suis pas tout le temps maladroite au travail, ce serait dramatique en tant que serveuse. Enfin bref

« Je vais aller chercher de quoi éponger, c’est gentil, mais je vais m’en charger ne vous inquiétez pas. » - Je disparaissais un instant pour revenir quelques secondes plus tard avec une serpillière pour nettoyer tout ça. Je remarquais une de mes collègues qui me regardait de travers et soupirai légèrement. Je commençais à éponger l’eau, l’homme s’était réinstallé à sa table. Je relevais la tête dans sa direction pour l’observer – « Merci de votre gentillesse. La plupart des gens m’auraient crié dessus, j’en suis sûre. C’est dramatique d’être si maladroite, les gens sont pas toujours très compréhensif. Remarque peut être qu’à leur place je me trouverai dangereuse, moi aussi. » - Riais-je pour me détendre un peu.

Il me trouvait amusante et non dangereuse. Le pauvre homme ne savait pas à qui il avait à faire : Une championne de la maladresse ! Parfois il m’arrive de ces trucs pas possibles et je me dis que ce genre de chose ne peut que m’arriver à moi. C’était risqué de choisir une place de serveuse sachant que les serveurs doivent être adroits et rapides. Vous vous imaginez une serveuse arrivant avec le plat du client, faisant tomber l’assiette et son contenu sur le jean du client ? Heureusement, ça ne m’est pas – encore – arrivé et j’espère que cela ne m’arrivera pas – « Vous savez, je peux vraiment être un danger ambulant parfois tant je suis maladroite. L’eau aurait pu se retrouver sur vous et non parterre. » - Riais-je, parce qu’il valait mieux en rire. L’homme ajoutait qu’il était content de voir qu’il n’était pas le seul à être perdu dans ce pays. J’en concluais qu’il ne vivait pas à Gold Coast depuis longtemps. La façon qu’il avait de parler était différente des Australiens et aussi des américains. D’après moi, il avait un accent bien britannique. Je terminais rapidement d’éponger l’eau sur le sol, puis le chien vint vers moi. Il était sorti de dessous la table pour s’asseoir sur mes pieds. Je souris. J’aimais bien les animaux, même si je n’en possédais aucun à la maison – « Il est mignon. Il s’appelle comment ? » - Demandais-je, curieuse. En tout cas, le maître semblait beaucoup aimé son chien.

Il ne fallut que très peu de temps à l’homme pour reconnaître un accent américain chez moi – « Oui, je suis américaine. J’ai débarqué en Australie qu’il y’a quelques semaines. » - Avouais-je alors sans trop entrer dans les détails. Raconter ma vie, ce n’est pas vraiment mon truc. En général, je me contente d’écouter les gens raconter la leur – « Je vais ranger ça et je reviens. » - Dis-je avant de m’éloigner avec ma serpillière et le seau. Je disparaissais un instant à l’arrière avant de revenir et de reprendre le cours normal de mon travail. Je reviens quelques minutes plus tard avec une autre gamelle d’eau pour le chien. Cette fois-ci je réussi à ne pas faire de catastrophe. Je pris une commande avant de me diriger vers les cuisines pour la transmettre avant d’en réceptionner une autre. C’était celle de l’homme avec son chien, l’anglais. J’arrivais vers sa table avec un grand sourire. C’est un de mes points positif, je suis souriante la plupart du temps – « Et voilà pour vous ! Si il manque quelque chose, n’hésitez pas à me le faire savoir. » - Dis-je en déposant le plat devant lui sur la table. Dans mon autre main, il y avait l’assiette pour le chien que je déposais sur le sol. L’animal ne se fit pas prier et vint mettre immédiatement le museau dans son assiette – « Donc vous venez aussi d’arriver à Gold Coast si j’ai bien compris ? Vous êtes Anglais, c’est ça ? » - Je ne pensais pas me tromper. Je marquais une courte pause avant de reprendre : « C’est étrange de se retrouver dans une ville et un pays qu’on ne connaît pas, n’est-ce pas ? » - Le fait de rencontrer un autre étranger me faisait me sentir moins seule. Bien qu’il y est des tas d’étranger à Gold Coast, car c’est une ville assez touristique, mais nous n’étions pas des touristes. Du moins, l’homme ne semblait pas en être un non plus. Et puis, à cette époque de l’année les touristes étaient plus rares, car la majorité des gens prennent leur vacances en juillet août.

Le jeune chien ne me quittait pas. Orson, c’était ainsi que son maître l’avait nommé, ajoutant qu’il était collant – « Je vois ça. » - Je riais légèrement, amusée – « Mais j’aime bien les animaux, alors ça ne me dérange pas… enfin il faut quand même que je continue à travailler. » - Ajoutais-je alors que le chien ne semblait pas décidé à s’éloigner de moi. Je fus forcé de le laisser pour aller faire mon travail. Ma collègue me regardait déjà de travers. Bizarrement, elle ne me fit aucune réflexion lorsque je passais devant elle. Peut-être qu’elle était plutôt du genre à aller tout « cafter » au patron directement ? Je ne connaissais Vanessa, ma collègue que depuis peu, mais je ne sais pas pourquoi, elle ne me faisait pas très bonne impression. Je préférais largement avoir à faire mes services avec Alex ou Isabel qui avaient tout de suite été accueillants. A l’inverse, Vanessa s’était tout de suite montrée froide, agacée par ma maladresse et ne cherchant pas vraiment à m’aider à m’intégrer. Enfin tant pis. Elle finira par se faire à moi et moi à elle. De toute façon, on n’a pas le choix. A moins que le patron ne me garde pas, ce qui serait assez dramatique puisque j’ai vraiment besoin de travailler. Je n’ai pas choisi la ville où la vie est la moins chère en plus. J’ai simplement choisi cette endroit parce que à deux reprises, j’ai adoré y passer des vacances. Cela remonte à tellement loin maintenant. Je n’étais qu’une gamine à l’époque.

Je revins vers mon client, dont je ne savais pas le nom, mais qui avait un gros point commun avec moi : Le fait de se sentir étranger à ce pays. Nous l’étions d’ailleurs, moi l’américaine et lui, le Londonien – « Je comprends tout à fait ce que vous pouvez ressentir. C’est pareil pour moi. Je ne connais pas grand-chose… ni grand monde d’ailleurs. Avant d’emménager ici, je n’avais jamais beaucoup bougé, alors c’est un grand changement. J’espère que j’arriverai à prendre mes repères à Gold Coast, mais pour l’instant je suis encore toute perdue. Vous avez débarqué ici seul ? » - Demandais-je, décidément bien curieuse. J’avais moi-même décidé de changer de vie et de venir vivre à Gold Coast seule, mais je pense que généralement, les gens font se genre de chose en couple, en famille ou même entre amis. Soudainement, l’homme ne semblait pas se sentir très bien. Il laissa retomber sa fourchette dans son assiette et posa sa main sur sa bouche – « Quelque chose ne va pas ? » - Demandais-je, inquiète, lui indiquant d’un geste l’endroit ou se trouvaient les toilettes. Le chien s’était redressé au moment ou le maître se levait. Orson semblait inquiet pour son maître.