BAR DU JUPITERS HOTEL – 17h05
Une belle après-midi venait de se dérouler à Gold Coast, je me souviens avoir passée l’après-midi sur la terrasse de ma maison à Currumbin, au bord de la plage, prenant un bon bain de soleil tout en lisant « Beloved » de Toni Morrison. Je levais mon nez du livre, quelque fois, afin d'admirer les vagues et les touristes qui s'arrêtaient sur le bord de mer ou bien qu'ils allaient prendre un petit bain en se piquant quelques longueurs dans l'océan. L’après-midi passa assez vite et je décidais de changer de paysage en me promenant dans le centre-ville, où je décidais d’envoyer un texto à Camille, un ami rencontré sur le tournage de mon dernier film indépendant, un cascadeur pour être plus précis. Il jouait la doublure de ma co-star et j’ai très vite sympathisé avec lui. C’est un homme très beau mais à la fois très complexe.

Message envoyé, il me proposa de se rejoindre au Jupiters Hotel, au bar –quelle bonne idée, pensais-je, endroit où l’alcool coule à flot, mais pour lui, je suis prête à tenir – je suis arrivée à 16h55 et m’asseyait au comptoir où je pris un verre d’eau. Le bar était sublime, la pièce ressemblait à une énorme pièce d’or. Le tout était très moderne et luxueux, malgré le fait que je sois connue, et que j’ai pu visiter des millions d’hôtels, rien ne vaut celui-ci. Malgré cette impression de richesse infinie, on se sentait à l’aise et comme à la maison. Je remarquais que des fans m’avaient reconnus et je leur fis un signe de tête voulant dire qu’ils pouvaient venir me parler ou autres…

Après quelques autographes signés pour quelques fans, j’aperçue Camille. Toujours aussi beau et souriant, il m’aperçut à son tour. Il me rejoignit avec sa démarche si masculine et je lui lançais un petit « Salut ! Comment va mon cascadeur préféré ? » Mon cascadeur préféré, petit surnom que je lui donnais sur le tournage du film, que voulez-vous, il y a toujours cette petite attirance qui sera toujours présente.

Le barman arriva à nous et nous demanda ce que nous voulions boire. Il était plutôt gringalet et très peu sûr de lui, il semblait être timide ou bien même apeuré de voir une célébrité à son bar. Sûrement un petit nouveau, pensais-je. Il dût se passer un petit temps avant que je ne réponde à sa question. Camille me souriait toujours autant, je repris donc mes esprits et répondit « Hmmm, un verre d’eau pour moi s’il vous plaît… » Ayant des problèmes avec l’alcool, je ne me voyais pas dire « Un verre de champagne et même … deux ». Cela aurait fait bien trop plaisir à la presse à scandale... En parlant d'eux, leurs paparazzis essayaient de prendre des photos de ma nouvelle apparition au bar, avec un "inconnu", un gros titre de plus comme on dit...

Spoiler:

Son portable vibra, le tirant brusquement de son sommeil et emportant par la même occasion son rêve aux oubliettes. Contrarié de voir sa sieste écourtée, le jeune homme laissa échapper quelques grognements. Il aurait bien dormi quelques heures supplémentaires. Affalé sur son lit, il n’eut qu’à tendre le bras pour atteindre son iPhone laissé en évidence sur la table de chevet. Il avait reçu un texto de Katherina lui demandant s’il était disponible plus tard dans l’après-midi. Son air mécontent disparut aussitôt au profit d’un sourire réjoui. Inutile de rappeler à quel point il appréciait la demoiselle. Pianotant sur son téléphone, il lui proposa de la retrouver au bar très distingué du Jupiters Hotel. Évidemment il ne s’agissait pas d’un tête-à-tête amoureux mais d’un simple rendez-vous amical. Camille ne niait pas l’attirance qu’il éprouvait à son égard, il préférait toutefois attendre d’être sûr de ses sentiments avant de tenter un jeu de séduction. Il multipliait donc les petites attentions sans jamais franchir la ligne dangereuse qui séparait amour et amitié, frontière souvent des plus ambiguës. Message envoyé. Il s’étira brièvement et se leva de son lit. Il ouvrit les stores de sa chambre, heureux de voir le ciel parfaitement dégagé. Pour les besoins d’un téléfilm en cours de tournage, il avait répété une série de cascades toute la nuit et n’était rentré que dans la matinée. Le bel Américain prit une douche puis opta pour un jean classique ainsi qu’un tee-shirt blanc porté près du corps. Il chaussa ses tongs en cuir et quitta son appartement. Avant de retrouver la jolie blonde, il fit un détour vers la plage au volant de sa Jeep. Il était à la recherche d’une petite babiole à offrir à Katherina, refusant de tomber dans le cliché du bouquet de roses.

Lorsque Camille arriva enfin à l’hôtel, il remarqua son amie installée à une table entourée d’un groupe de fans. Il attendit poliment qu’elle signe le dernier autographe puis s’avança dans sa direction, un sourire charmeur au coin des lèvres.
« Content de voir que tu ne m’as pas encore remplacé. » Répliqua-t-il avec humour, il ne voulait pas perdre son titre de cascadeur préféré.
« Très bien et toi ? » Il n’attendit pas sa réponse et déposa sur la table son cadeau emballé dans du papier journal ; une tortue en céramique à la carapace multicolore. « Pour toi. »

Le barman ne tarda pas à arriver. Camille réalisa alors l’énorme gaffe qu’il avait commise. Il savait pourtant que Katherina avait sombré dans l’alcool. Quel manque de tact, il était parfois si maladroit. S’en mordant les doigts, il commanda un jus d’oranges. Plongeant son regard émeraude dans celui de son interlocutrice, il déclara, embarrassé et sincèrement désolé :
« Je te présente mes excuses, t’inviter dans un bar était vraiment maladroit de ma part. Si tu es mal à l’aise, on peut s’en aller. »
Aussi, il remarqua qu’un groupe de paparazzi s’était déjà regroupé derrière la baie vitrée du bar. Décidément rien ne se passait comme il l’avait imaginé.

À la vue de son visage et de son air assez gêné, je compris qu’il se rappelait peu à peu de mon âge noir, la pire période de ma vie. Néanmoins, j’essayais de ne pas y prêter attention d’autant plus que son petit cadeau me faisait énormément plaisir. Une tortue en céramique, c’est tout de même bien loin du cliché des fleurs, même si c’est un beau cliché mais ce que j’ai toujours aimé avec Camille, c’était son originalité. Il ne voulait pas tomber dans la banalité et je trouvais ça admirable.

Il me proposa de quitter les lieux, dû au bar, chose que je pourrais bien sûr accepter mais à la vue des paparazzis, ça risque d’être une histoire compliquée. « Ce n’est pas que je ne veux pas te suivre mais mes ‘amis’ me suivent un peu partout en ce moment. Ils attendent la moi d’il y a 4-5 ans. » Je m’efforçais de sourire, il savait bien que cette période de ma vie était plus que traumatisante pour moi. Je lui en avais parlait lors du tournage. Je regardais toujours d’un air attristé mon verre d’eau, laissant paraître mon envie d’échapper de cette vie, au moins une seule fois…

« Au fait, merci pour le cadeau. C’est vraiment très adorable de ta part. » Je me levais de ma chaise pour le serrer dans mes bras. Il sentait bon, et son Tee-Shirt laissait apparaître un corps musclé. C’est assez étrange mais lorsque j’étais dans ses bras, je me sentais en sécurité. Comme si rien ne pouvait m’atteindre, même les paparazzis étaient presque invisibles à présent. Après cet enlacement, j’eue une idée. « Et si on sortait par l’arrière de l’hôtel ? Ou alors je sors par l’arrière de l’hôtel et toi tu vas chercher ta voiture et on se fait une petite virée ? » J’avais l’impression d’être une folle à la vue de son regard lorsqu’il m’entendit énoncer cette hypothèse il acquiesça. Je m’apprêtais donc à quitter le bar par l’arrière et il partit chercher la voiture.

Je déposais l’argent sur le comptoir discrètement afin que les paparazzis ne remarquent pas que j’essayais de quitter le bar et l’hôtel. J’y laissais un pourboire puisque malgré la gêne du serveur en me voyant, il n’était pas embêtant, ni grossier. Je sortais donc de l’hôtel par les portes de services en attendant que Camille n’arrive. Je mis mes lunettes de soleil, mon sac à main sur mon épaule et attendis sagement la présence de Camille. Après quelques minutes d’attente, sûrement dû à l’omniprésence des paparazzis, la voiture de Camille était devant moi et je montais dedans. « C’est parti pour un tour ! » La fin de journée/début de soirée s’annonçait bonne en sa compagnie.

Lexis avait brièvement entendu parler des épreuves traversées par Katherina quelques années auparavant. Il préférait toutefois éviter d’aborder le sujet lorsqu’il était à ses côtés, persuadé qu’elle ressortait aujourd’hui plus forte des erreurs commises par le passé, au grand dam des tabloïds qui préféraient la voir sombrer à nouveau.
« Tant pis pour eux, ils attendent en vain. » Répondit-il d’un ton enjoué. Plus sérieux, il reprit, se voulant amical et rassurant :
« Ton passé est derrière toi. Je suis sûr que tu es un modèle pour ceux qui traversent ce que tu as vécu, une source d’inspiration. »

La célébrité, un univers qu’il côtoyait au quotidien sans pour autant vouloir en faire partie. Rester dans l’ombre des acteurs hollywoodiens lui convenait parfaitement. Spectateur discret, Camille était simplement heureux et reconnaissant de pouvoir vivre de sa passion. Il ne recherchait pas l’exposition médiatique, bien au contraire, la simple reconnaissance de ses employeurs lui suffisait. En effet, le jeune Américain avait au fil du temps appris à se méfier des excès engendrés par la célébrité, notamment grâce à son amitié sincère avec le bassiste du groupe Dark Shines. Reedan se moquait éperdument des codes du star-system et n’hésitait pas à se jouer régulièrement des paparazzi. A l’instar du musicien, la douce Katherina ne manquait pas de ressources et semblait avoir plus d’une corde à son arc. Celle-ci lui proposa d’esquiver les flash des photographes indiscrets en sortant par l’arrière pendant qu’il irait chercher sa voiture. Plan qu’il approuva d’un signe de tête.

Ainsi, C.N se leva à son tour puis quitta l’hôtel, passant impassible devant la horde de paparazzi. Son sourire réjoui ne quittait plus ses lèvres. Il était content, elle avait apprécié son cadeau. Il aurait voulu la serrer plus longtemps dans ses bras mais étrangement en sa présence, il perdait tous ses moyens et se sentait des plus vulnérables, sûrement attendri par le charme de la demoiselle. Cruelle ironie pour celui qui détenait pourtant une volonté d’acier doublée d’un égo démesuré, carapace amplifiée par son douloureux divorce. Justement, ce road trip improvisé serait peut-être l’occasion pour lui d’avouer tout haut les sentiments qu’il éprouvait à son égard ?

Au volant de sa Jeep citadine noire, le garçon contourna le bâtiment, tâche délicate sachant que les paparazzi ne ressentaient aucun scrupule à gêner la circulation. Une fois derrière l’hôtel, il déverrouilla les portières et put accueillir Katherina au sein de son véhicule, apparemment prête et motiver à s’évader. Il alluma la radio en fond sonore et prit la route qui bordait l’océan. Au premier feu rouge, il sortit son iPhone de la poche de son jean et le tendit à son interlocutrice.

« Tu l’éteins ? Et je t’invite à faire de même avec le tien. Prête à te couper du monde le temps d’une soirée ? »

L’entendre dire que je pouvais être une source d’inspiration était la plus grande récompense dans mon métier, malgré que je n’ai jamais voulu être un modèle, cela faisait toujours plaisir. Il semblait si vrai, si loin de toutes ces paillettes qui nous aveuglent, il a toujours aimé être dans l’ombre des « plus grands » et parfois, je me souviens que sur le tournage de Dark Trip, certains en jouaient un peu trop et comme, c’était mon premier tournage depuis l’âge noir, je me sentais un peu exclue dans le sens où les mentalités étaient bien différentes dans ce monde. C’est d’ailleurs grâce à ça que je me suis rapprochée de Camille, on passait des heures à discuter, il venait sur le plateau même s’il n’était pas appeler juste pour que l’on discute, tout ce qu’il fallait pour que je passe un très bon tournage…

Suite à mon plan, j’attendais donc à l’extérieur de l’hôtel quand je le vis. Je montais dans la voiture et je sentais que la fin de journée allait être plus qu’agréable voire même exceptionnelle. Je ne sais pas pourquoi mais le fait de monter dans sa voiture me remémorait un souvenir lointain, lorsque mon père m’emmenait voir maman à l’hôpital après qu’elle ait donné naissance à Caliope, et ce sentiment n’était pas très joyeux puisque j’ai eu le droit à l’annonce du sexe du bébé et mon père souriait comme si c’était ce qu’il voulait et en me rappelant qu’il aurait préféré un garçon que moi… Revenue à la réalité, Camille me proposa d’éteindre mon téléphone pour me couper du monde et donc faire en sorte qu’on ne soit que deux. Je n’étais pas contre… « Bien sûr, si tu promets d’être un parfait gentleman. » Je me mis à rire, j’ai dû sortir cette phrase un million de fois dans mes films avec émotions que dans la réalité, je ne pouvais pas du tout garder mon sérieux en disant ça. J’avais confiance en Camille, c’était totalement un homme digne de confiance et il était prêt à n’importe quoi pour les personnes qu’il aimait et je me sentais chanceuse d’être l’une de ces personnes. Mais cela ne m’empêchait pas d’être un tout petit peu nerveuse puisqu’une certaine attirance existait entre nous. Je ne pouvais cacher qu’il me plaisait, il était beau, séduisant et surtout, il était mature. Cela faisait un baille que je ne m’étais pas remise dans une relation, pour être exacte depuis ce soi-disant « homme de ma vie » qui m’a faite dépendante. Depuis ce temps, je ne voulais plus rien avoir à faire avec les hommes en ce qui concernait une relation amoureuse mais avec Camille, tout était différent. Nous étions en quelques sortes pareilles, il avait souffert de son divorce et moi de ma relation en général. « Bon alors, où allons-nous Monsieur le Conducteur ? » Je le regardais, il était sérieux mais à la fois amusé. Je voulais tout simplement que le temps s’arrête…