C'est bien d'être passionnée, mais lorsque cette passion devient une obsession, elle peut réellement être néfaste. Je l'ai appris à mes dépends. Depuis mon enfance, mes champions olympiques de parents m'ont toujours poussé à faire de la natation et surtout à être le meilleur de mes petits camarades. Bien sûr que j'étais le meilleur avec un père champion olympique de natation, il ne pouvait en être autrement. Durant mon enfance je voyais mes parents comme des héros, de véritables héros qui étaient connus et reconnus dans le pays entier et même dans le monde. J'étais fier d'eux, fier d'avoir des parents comme ça, mais j'ai vite déchanté. A 12 ans, ils ont voulu me déscolarisé et j'ai catégoriquement refusé. Ils avaient tous les deux arrêté leur carrière depuis près de 10 ans pour mon père et avant ma naissance pour ma mère. Avant ça je ne l'avais jamais vraiment remarqué, mais la compétition, ça leur manquait et ils avaient envie d'y revenir par l'intermédiaire de leurs deux enfants, moi dans la natation et ma soeur en gymnastique. Ma soeur était trop jeune et tellement passionnée que lorsqu'elle fut déscolarisée quelques années plus tard, alors qu'elle avait 10 ans, elle fut très heureuse. Elle pouvait enfin se consacrer à la gymnastique au plus grand plaisir de ma mère. Mais moi je ne voulais pas. A son âge, j'avais déjà mon petit caractère têtu et des amis que je ne voulais pas perdre. J'ai tenu tête à mes parents pendant des années, je me suis éloigné d'eux et au bout du compte j'ai gagné, ils ont abandonné et à partir de mes 15 ans, ils ont arrêté de me harceler et de me mettre la pression pour que je fasse de la compétition. Je ne voulais pas en faire, je voulais que ma passion de toujours reste un loisir, un moyen de me détendre et non une source de stress. A partir de ce moment-là, ils se sont totalement désintéressés de moi pour se consacrer à ma sœur qui avait 6 ans et qui aimait déjà la gymnastique plus que tout.. J'ai fait ce que je voulais de mon adolescence, bêtises sur bêtises, ils m'ont laissé tout faire, comme si l'avenir de leur fils n'avait aucune importance. J'ai choisi mes orientations scolaires seul, sans le soutien de personne en ayant eu aucun conseil de mes parents. Je pense que ça m'a été bénéfique, après tout, j'ai ainsi pu grandir et devenir autonome, bien plus vite que tous les autres de mon âge.

Pendant longtemps, j'ai essayé de préserver ma soeur de l'envie de compétition de mes parents. Mais elle ne m'a jamais écouté, elle voulait vivre sa passion à fond et ce fichait d'avoir de vrais amis. Elle ne vivait que pour la gymnastique. J'ai toujours pensé que c'était une mauvaise chose. A 18 ans, ses seuls amis étaient des personnes qui faisaient de la gym et comme vous pouvez le deviner, ils étaient tous en compétition les uns contre les autres... Ce n'est pas ce que j'appelle une amitié. J'ai donc vécu en parallèle du reste de ma famille. J'ai profité de mon adolescence, rencontré des personnes plus ou moins fréquentables, je me suis fait des amis et malgré mon dur caractère et mon côté « Don Juan & sans coeur » je suis même tombé amoureux. J'avais 16 ans, j'étais jeune, encore un peu naïf mais beaucoup plus mature que beaucoup de mes amis. Elle avait 18 ans et ressemblait à une déesse. Nous avons eu notre petite histoire et je l'avoue aujourd'hui, j'étais fou d'elle. Ca n'a pas duré très longtemps, juste assez pour renforcer mon caractère encore un peu plus. J'ai toujours eu une réputation de gros dure qui se fait une à une, toutes les filles du bahut... C'était un peu vrai, mais plus je voyais ma soeur s'enfermer dans les règles de mes parents alors qu'elle était si jeune, plus je voulais profiter de ce qu'elle ne pouvait pas faire : grandir et s'endurcir. J'ai donc appris par moi-même à obtenir tout ce que je voulais, je ne comptais sur personne et je n'avais aucune envie qu'on me dise quoi faire. Déjà très jeune, j'étais maitre de moi-même.

J'ai fait quelques conneries et par la même occasion je me suis de plus en plus éloigné de mes parents. On pourrait croire que je m'étais également détaché de ma soeur, mais ce ne fut jamais le cas. Elle était jeune, voulais vivre sa passion à fond et je voulais qu'elle soit heureuse. Je l'ai toujours encouragé tout en lui faisant cependant comprendre qu'elle passait à côté de beaucoup de choses. Nous avions près de 10 ans de différence et lorsque je voyais ce qu'elle faisait à 14 ans, je repensais à ce que moi je faisais à ce même âge ... nous étions à des kilomètres l'un de l'autre. Pourtant, je l'ai toujours encouragé, je voulais qu'elle soit heureuse et apparemment, c'est la gym qui la rendait heureuse.

De mon côté, à 24 ans, j'ai déménagé à Gold Coast. Je ne vivais plus chez mes parents depuis plusieurs années déjà, mais j'avais besoin d'encore plus de distance, de changer d'air. Le fait d'avoir rencontré - ou plutôt revu - cette femme, Isobel et d'en être retombé amoureux 8 ans plus tard a été très important dans ma décision de déménager. Après 6 mois de nouveau ensemble, j'ai donc emménager chez elle dans cette petite ville de Gold Coast. Là-bas, j'ai refait ma vie loin de Sydney, tellement plus calmement. Je me suis refait des amis, des ennemis, des connaissances, je me suis refait un nom et j'ai trouvé un boulot dans cette charmante petite ville. Bien sûr ma soeur me manque, d'année en année elle s'améliore dans sa discipline et bien sûr je ne peux m'empêcher d'être fier d'elle. Tout était parfait pour elle ... enfin c'est ce que je croyais.

Puis il y a eu cet accident. Nous étions tous les deux dans la voiture et je le sais, c'est à cause de moi si désormais elle ne peut plus faire de gym. J'étais venu lui faire voir mon nouveau bijou, ma nouvelle voiture. Un accident assez grave pour qu'elle ait des séquelles à vie. J'en suis ressortie avec quelques égratignures et quelques côtes cassées, elle en est ressortie avec un avenir sportif foutu. Encore aujourd'hui je m'en veux énormément, c'est de ma faute et je m'en voudrais toute ma vie. Après que les médecins lui ait appris cette terrible nouvelle, ce fut un choc pour tous et mes parents ne s'en remettent surtout pas.

Après ca elle est venu habitait chez moi, à Gold Coast. Je l'ai accueilli très chaleureusement, je m'en voulais tellement de ce qui lui arrivait, tout était de ma faut. Depuis son arrivée, je l'aide du mieux que je peux, j'ai l'impression de lacher un bébé de 1 an au beau milieu de la jungle. Avant ca, tout était tracé pour elle, elle n'avait pas à se préoccuper de ce qu'il se passé autours. Elle ne vivait que pour la gymnastique, pour rien d'autre.